La rencontre avec notre troisième bébé était planifiée, millimétrée, organisée. C'est l'avantage de la césarienne programmée. Il faut bien qu'il y en ait un...
Little Baby devait arriver le mardi 05 août au matin. Je devais rentrer le 4 au soir à la maternité, réaliser les derniers bilans, prendre la fameuse douche à la bétadine, dormir d'un oeil en attendant impatiemment mais avec une certaine appréhension le petit matin et la rencontre avec mon bébé.
Little Girl et Baby Boy devaient passer une semaine avec leurs grands-parents au bord de la mer. Nous devions les emmener avec James le dimanche sur place, passer une nuit avec eux en guise de "pseudo-vacances" et repartir le lundi pour la maternité, du sel dans les cheveux et les orteils encore plein de sable, en ayant pris le temps de leur dire au revoir et de leur expliquer ce qu'il allait se passer.
Le samedi 2 août, veille de leur départ à la mer, nous avions décidé de passer une journée tous les 4 ensemble, notre dernière journée à 4. Au programme, un petit restau et une séance de cinéma, pour aller voir Planes 2.
Ce matin-là je me suis réveillée fatiguée, avec peu d'énergie mais bien décidée à passer cette dernière journée avec eux. Je ressentais de temps à autre des petites douleurs dans le bas ventre, mais sans y prêter trop attention.
On a donc maintenu le programme du jour. J'ai préparé une grande partie de leurs affaires pour le départ à la mer puis nous sommes partis au restau et au cinéma.
En rentrant du ciné, j'ai commencé à ressentir de plus en plus des douleurs dans le bas du ventre. James m'a proposé alors de m'allonger un peu sur le canapé. Nous étions le 2, mon terme était le 20, il n'y avait pas de quoi s'alarmer.
Une nouvelle douleur est alors apparue et cette fois-ci j'ai senti que quelque chose était en train de se passer. Je n'ai jamais ressenti de contractions lors de mes précédentes grossesses, je ne savais donc pas les identifier, mais je me suis dit qu'il valait quand même mieux que je finisse de boucler rapidement leurs valises pour la mer et ma valise pour la maternité en essayant de ne pas mélanger les deux.
Je suis montée à l'étage, j'ai préparé les affaires quand tout à coup, j'ai perdu du liquide, beaucoup de liquide. Plus de doute, le travail avait commencé, la poche des eaux venait de se fissurer, il fallait partir à la maternité.
J'ai prévenu James, qui à de suite appelé ses parents mais qui, comme à son habitude, est resté zen. J'ai terminé de préparer les affaires en essayant de ne rien oublier et on a expliqué aux enfants que finalement, le programme était en train de changer. Leurs grands-parents allaient arriver et nous allions partir pour la maternité.
J'étais à la fois excitée et un peu anxieuse car je devais quitter mes enfants de manière précipitée et que rien ne se passait comme prévu ...
Avec James on a pris le chemin de la maternité. Il était 17h. C'est notre troisième bébé, mais c'était la première fois que l'on vivait ces moments si particuliers. Pour la première fois notre bébé avait décidé d'arriver par lui-même et non pas à une date programmée par les médecins et ça changeait tout !
Arrivés aux urgences les contractions se sont faites de plus en plus rapprochées. On a attendu une heure avant que je puisse être examinée. Finalement une sage-femme est arrivée et nous a installés dans un box qui venait de se libérer. Elle m'a posé un monitoring, contrôlé l'ouverture de mon col et m'a dit qu'elle allait voir avec l'interne si on programmait la césarienne pour le soir même ou si on attendait le lendemain matin. J'ai croisé les doigts pour que la césarienne soit réalisée au plus tôt parce que je commençais vraiment à souffrir. Les contractions se rapprochaient et se succédaient toutes les deux minutes.
Finalement, la sage-femme est revenue et m'a dit que la césarienne allait avoir lieu dès qu'un bloc se libèrerait. J'étais soulagée, James aussi. Mais ce 2 août plusieurs césariennes se sont succédées, en urgence et j'ai dû attendre 21h pour enfin rentre au bloc avec des contractions séparées à peine de quelques secondes.
La salle du bloc opératoire était toute neuve, grande, avec des orchidées sur les murs ce qui la rendait moins sinistre que les autres salles que j'avais connues jusque là. L'équipe était nombreuse, souriante, jeune et très agréable. Ils se sont présentés tour à tour, ont pris le temps de parler avec moi, de m'expliquer ce qu'il allait se passer, de me dire chaque geste qu'ils étaient en train de pratiquer. Ils m'écoutaient, prenaient en compte mes remarques et acceptaient que James assiste à cette césarienne. Tout se passait pour le mieux.
Entre deux contractions, l'anesthésiste m'a posé la rachianesthésie. Etrangement et contrairement aux autres fois je n'ai senti aucune douleur. La rachianesthésie a commencé à faire effet, la douleur des contractions s'est estompée, mes jambes sont devenues légères, je ne sentais plus mes orteils mais je n'avais plus mal.
J'étais bien.
La césarienne a commencé. Elle a duré assez longtemps puisque une troisième césarienne complique un peu l'intervention. Finalement, au bout de 20 minutes on m'a prévenue que Little Baby allait arriver. Mais il se cachait tout au fond de mon ventre et ne se laissait pas facilement attraper. Finalement, il est né. On me l'a montré rapidement par-dessus le champ opératoire, on l'a frictionné et je l'ai entendu crier. Enfin.
La sage-femme présente dans la salle est venue me montrer mon petit bonhomme. Il était beau, il était tout chaud. Elle l'a posé près de mon visage, il s'est arrêté immédiatement de pleurer et a essayé de téter ma joue. Les bras immobilisés, je n'ai pas pu l'attraper mais j'ai savouré pleinement ce moment qui n'a duré que 5 minutes mais qui m'a paru durer une éternité comparé aux quelques secondes où l'on m'a laissée entrevoir mes enfants lors des césariennes précédentes.
Little Baby a été ensuite rapidement emmené dans une pièce plus chaude pour être réchauffé. Il a été mis en peau à peau sur son papa pendant que les médecins finissaient les dernières étapes de la césarienne.
J'ai quitté ensuite le bloc pour la salle de réveil où je devais passer 2 heures avant de pouvoir remonter en chambre. Pour Little Girl et Baby Boy c'est à chaque fois 4 heures que j'ai passé seule dans cette chambre de réveil, sans voir mon mari, sans voir mes bébés, à me demander si tout allait bien, à essayer de les imaginer, à ne pas pourvoir les allaiter immédiatement et sans jamais avoir pu les tenir dans mes bras aux premières heures de leurs vies.
Mais ce 2 août, dans cette maternité, les choses étaient bien différentes. Au bout de 30 minutes, j'ai vu arriver en salle de réveil James et Little Baby. On a posé ce tout petit bébé sur moi, en peau à peau. Il a essayé de téter, sans grand succès, mais il était là, avec moi, avec James. J'étais bien, j'étais heureuse, je n'étais pas seule.
A 1 heure du matin, on a pu retourner dans notre chambre. Je tenais toujours mon bébé contre moi. C'est la première fois que je remontais en chambre en tenant mon nouveau-né.
Little Baby a pleuré quasiment toute la nuit, il paraissait déboussolé, un peu paniqué, il ne parvenait pas à téter. Mais ni ses pleurs, ni ses cris, ni sa difficulté à téter ne pouvaient m'ébranler. J'étais sereine, comme je ne l'avais jamais été.
Pour la première fois de ma vie, j'ai eu l'impression d'accoucher, de mettre au monde mon bébé, d'être là pour lui dès les premiers moments de sa vie.
J'ai enfin ressenti les douleurs des contractions qui précèdent la venue au monde de son bébé, je sais ce que l'on ressent lorsque l'on perd les eaux, j'ai connu l'excitation de devoir me rendre à la maternité sans que ce soit prévu, simplement parce que mon tout petit bébé avait décidé de naître à ce moment précis.
Grâce à tout ce que j'ai vécu ce 2 août, le manque que j'ai ressenti à la naissance de mes deux ainés a enfin été comblé.
Une nouvelle fois, j'ai donné la vie par césarienne mais pour la première fois, j'ai eu l'impression d'accoucher, d'être actrice de cette naissance.
Il aura suffi que la nature change les plans dictés par les médecins, il aura suffi de quelques gestes simples, de quelques paroles, d'un peau à peau et de quelques personnes humaines et compétentes pour me réconcilier enfin avec la maternité.
Little Baby à 15 jours aujourd'hui. C'est un petit bébé très calme et très zen. Depuis 15 jours je suis une maman comblée. Fatiguée parce que les nuits sont un peu agitées, mais comblée.
Comme quoi, le hasard de la vie, quelques gestes simples et quelques paroles suffisent souvent à tout changer.
Un grand merci à toute l'équipe de l'hôpital Pellegrin de Bordeaux pour cette belle rencontre avec mon bébé.